Commentaires du WWF-RDC sur le rapport de RRI intitulé : "Maï-Ndombe : le laboratoire de la REDD+ bénéficiera-t-il aux Peuples Autochtones et Communautés Locales ?

Posted on April, 27 2018

Ce document constitue la réponse de WWF aux allégations du dernier rapport de RRI (Rights and Resources Initiative) de mars 2018
Commentaires du WWF-RDC sur le rapport de RRI intitulé : 
 
"Maï-Ndombe : le laboratoire de la REDD+ bénéficiera-t-il aux
Peuples Autochtones et Communautés Locales ?"
 
Le WWF et ONG partenaires saluent l’analyse faite par RRI visant à évaluer, au vu des outils existants, la mise en œuvre du processus REDD+, les risques et impacts cumulatifs de l’ensemble des initiatives REDD+ sur les droits et moyens de subsistance des communautés locales et des peuples autochtones.
 
Le WWF et ONG partenaires entrevoient la REDD + comme un moyen d’atteindre une conservation holistique et de faciliter la durabilité de ces résultats, mais pas comme une fin en soi. Ces résultats comprennent les avantages non carbones, particulièrement ceux liés à la conservation de la biodiversité ainsi que ceux soutenant la reconnaissance des droits des peuples autochtones et des communautés locales. La REDD+ n’est pas une solution miracle pour contrer la dégradation ou la destruction des forêts et doit être planifiée, développée et mis en œuvre de manière inclusive et participative afin d’être plus efficace.
 
Le WWF et ses partenaires participent à la mise œuvre de plusieurs initiatives, projets et programmes REDD+ dans les 3 plus grands bassins forestiers tropicaux du monde et collaborent activement dans le développement des outils REDD+ avec une expertise avérée, facilitant des échanges sud-sud en matière de connaissances et des leçons de terrain (voir le lien ci-après : http://wwf.panda.org/what_we_do/footprint/forest_climate/forest_climate_publications/).
 
Le travail du WWF sur la REDD+ n’est pas axé sur la production de crédits compensatoires pour les marchés, mais sur l’augmentation des finances axés sur les résultats, le renforcement de la gouvernance et la participation effective des parties prenantes ainsi que le rehaussement du profil des forêts comme aspect essentiel dans les programmes nationaux et internationaux pour l’atteinte des objectifs climatiques adoptés sous l’Accord de Paris et négociés à la conférence sur le climat (COP21) de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.
 
 
Le WWF et ONG partenaires respectent notamment les 5 principes directeurs pour la REDD, développés en collaboration avec Greenpeace et CARE International. Ces principes sont :
  • Climat: La REDD+ manifestement contribue à la réduction des émissions de gaz à effet de serre avec des objectifs nationaux conduisant à l’atteinte d’un objectif mondial;
  • Biodiversité: La REDD + maintien ou améliore les services de la biodiversité et des écosystèmes forestiers; 
  • Moyens de subsistance: La REDD+ contribue au développement durable et équitable en renforçant les moyens de subsistance des communautés tributaires des forêts; 
  • Droits: La REDD+ reconnaît et respecte les droits des peuples autochtones et des communautés locales; et,
  • Financement équitable & effective : La REDD + mobilise des ressources immédiates, adéquates et prévisibles pour l’action dans les zones forestières prioritaires de manière équitable, transparente, participative et coordonnée.
 
Ces principes directeurs, ainsi que les outils, procédures et méthodologies développées au  niveau international ont été respectés dans le développement du Programme de Réduction d’Emission (PRE) de la province du Maï-Ndombe (MN), tel que validées par la Fonds Carbone du Fonds de Partenariat pour le carbone forestier (FCPF en anglais). 
 
Plusieurs conclusions et priorités d’action du rapport de RRI pour atténuer les risques de mise en œuvre de la REDD+ dans le Maï-Ndombe sont pertinentes au regard du continuum des initiatives, projets et programme REDD+ réalisés et/ou à réaliser dans la province de Maï-Ndombe et même à l’échelle de la RDC et au-delà. Dans ce document, le WWF-RDC et les ONG partenaires ne visent pas à revenir sur l’ensemble des recommandations, mais souhaitent se concentrer sur la recommandation 3 à la page 69 qui stipule :
 
  • Finaliser et rendre opérationnels les principaux outils de gouvernance (mécanisme de recours et de rétroaction, plan de partage des bénéfices, système d’information des sauvegardes, mécanisme d’observation indépendante) et consolider la structure de coordination nationale et provinciale de la REDD+. 
 
Pour cette recommandation, le WWF-RDC et ONG partenaires voudraient souligner que leur position s’aligne avec celle de la société civile de la RDC et autres parties prenantes du PRE - Programme de Réduction des Emissions - Maï-Ndombe déjà formulée concernant spécifiquement la finalisation du plan de partage de bénéfices toujours en attente et négociation suite aux commentaires présentés à la CNREDD et autres institutions impliquées dans ce processus (voir annexe 1,2,3 & 4).
 
Il est vrai que le système d’information des sauvegardes REDD+ doit encore être amélioré. Beaucoup de travail a été fait dans le cadre du PRE Maï-Ndombe (voir travaux du groupe de travail 5 pour la préparation du PRE) avec l’appui de CCBA, de la société civile et une participation effective des représentants des 8 territoires du Maï-Ndombe. D’ailleurs, l’ONG OCEAN avait facilité l’identification desdits représentants. Malheureusement le financement nécessaire n’avait pas été suffisant et cette action non complétée. 
En ce qui porte de rendre opérationnel les outils de la gouvernance et consolider la structure de coordination nationale et provinciales de la REDD+,  le WWF-RDC et les ONG partenaires sont aussi d’avis que des outils doivent être développés. Cependant, il est important de mentionner que plusieurs outils, textes réglementaires, lois existent déjà en RDC sans pour autant être appliqués et/ou opérationnalisés. Dès lors, il convient de procéder à une opérationnalisation de certaines pratiques en parallèle au développement des textes relatifs afin d’en tirer les meilleurs leçons prospectives et pratiques pour une application accrue. Sans prétendre ici être exhaustif, le WWF-RDC et les ONG partenaires à travers les projets mis en œuvre de façon participative, réalisent notamment des actions (reconnues et appuyées par la société civile de la RDC) afin de rendre opérationnel la gouvernance du Maï-Ndombe et l’observation indépendante.
 
Nous tenons à souligner que le WWF-RDC travaille depuis plusieurs années en bonne collaboration avec les parties prenantes du secteur, notamment de la société civile. Sans les appuis soutenus et la participation effective de ces acteurs dans les travaux de la REDD+ en RDC, il n’aurait pas été possible d’enregistrer toutes les avancées constatées objectivement durant les dernières années.
En ce qui concerne nos travaux, nous nous sommes focalisés à faciliter la mise en place des organes de gouvernance locale pour une participation effective des parties prenantes, notamment par:
 
  • L’appui aux communautés et peuples autochtones à être officiellement reconnues sur leur territoire. Leurs observations et consentement libre, informé et préalable,  sont évidemment essentiels. De nombreuses communautés sont maintenant officiellement reconnues suite à nos efforts au Maï-Ndombe;    
  • L’appui au Conseil Agricole Rural de Gestion et plateforme de concertation aux différents niveaux opportuns de décentralisation de la province afin de permettre les échanges (et observations) entre acteurs ;
  • L’appui au Comité de Pilotage REDD+ Maï-Ndombe présidé par le Gouverneur de Province et où des représentants de la société civile, des communautés, PA et autres acteurs sont présents et peuvent évidemment émettre leurs avis et observations ;
  • L’appui à la mise en place et opérationnalisation du Conseil Consultatif Provincial des Forêts, de façon représentative, permettant aussi de recueillir les avis des parties prenantes, de régler des conflits, etc. ;
Concernant plus particulièrement le projet PIREDD Plateaux, le WWF-RDC et les ONG partenaires planifient d’organiser prochainement un atelier provincial présentant les principales méthodologies et avancées (voir annexes 18&19). Ces consultations publiques fréquentes qui ont caractérisés les travaux REDD+ du Maï-Ndombe se sont toujours avérées utiles afin de répondre aux incompréhensions et combler les lacunes pouvant être encore présentes dans la mise en place du mécanisme REDD+ en RDC.
 
De façon générale, le WWF-RDC et les ONG partenaires sont donc d’accord avec RRI concernant les travaux encore en cours et qui doivent être finalisés rapidement concernant le plan de partage de bénéfices, le mécanisme de plainte et recours, la formalisation de l’observation indépendante mandatée, etc.
 
Cependant, plusieurs autres aspects du rapport nécessitent des éclaircissements et/ou requièrent des précisions de notre part y compris:
 
  • La méthodologie appliquée par RRI repose sur une base documentaire avec seulement quelques informations de terrain collectées, non exhaustives et encore moins systématiques. Cette façon de procéder avec des sources de terrain incomplètes pourrait donner suite à des recommandations biaisées.
  • Certains acteurs, selon leurs niveaux d’implication, auraient dû bénéficier d’une consultation plus importante que celle opérée par RRI. Par exemple, le porteur de projet PIREDD analysé sous le rapport, les représentants autochtones, les communautés locales, etc. En effet, WWF est la seule organisation parmi les acteurs travaillant de façon continue dans cette province de Maï-Ndombe étant présente dans tous ses territoires. Pourtant, le WWF est probablement l’acteur le moins consulté par l’étude RRI et pourtant beaucoup d’affirmations sont faites sur sa façon de travailler. Nous avons deux personnes qui ont été consultées par téléphone pendant quelques minutes mais les questions posées ainsi que les réponses données n’ont pas été publiées. ; 
  • Normalement, les parties prenantes et particulièrement ceux cités dans le rapport auraient pu bénéficier d’une transparence dans le traitement des informations et ainsi être consultés avant la publication du rapport afin de permettre la vérification des affirmations faites dans le document;
  • L’approche de travail de WWF-RDC a été mise en doute à l’exemple de la durée de jours de réalisation de la cartographie participative. Il a été mentionné que le WWF RDC ne faisait que 2 jours lors des missions de cartographie participative. Cependant, il n’a pas été mentionné que la cartographie participative n’est qu’une étape du processus mis en œuvre par le WWF (voir annexe 5). En fait, ce qui a été relevé par RRI n’est qu’une étape dans un processus beaucoup plus complexe et utile permettant de clarifier les droits d’usage (officiellement), définir les affectations des terres, préparer des plans de gestion des ressources naturelles (PGRN), appuyer les communautés dans le choix de leurs activités prioritaires, etc. Tout ce processus permet d’ailleurs la réalisation des plans d’aménagement du territoire tel que prescrit jusqu’à maintenant dans les textes relatifs et tout à fait nécessaire pour le développement durable du pays.
  • Aussi, l’implication du WWF-RDC et ONG partenaires au Maï-Ndombe auprès des communautés locales et peuples autochtones n’est pas nouvelle et ponctuelle. WWF RDC a des bases ainsi que des activités permanentes avec du personnel à Malebo, dans la Chefferie de Batéké Nord, territoire de Bolobo et d’autres antennes à Oshwe, Mushie, Kwamouth, Yumbi, Bolobo cité, Inongo.  Ceci est un gage d’engagement long terme et de durabilité dans l’accompagnement des communautés locales et peuples autochtones par rapport à d’autres organisations opérants en RDC.
 
 
Bien que le WWF RDC et les ONG partenaires soient d’accord avec plusieurs recommandations du rapport de RRI, nous avons quand même constaté certaines mentions erronées des approches, pratiques et activités mises en œuvre. A titre de contribution pour une meilleure compréhension du mécanisme REDD+ en RDC et afin de rétablir les faits concernant leurs activités, certains aspects du rapport ont été commentés ci-dessous. 
 
Le point 2.7 intitulé : Une participation limitée des communautés aux processus décisionnels
 
Dans ce point du rapport et dans d’autres passages, RRI stipule que :
 
  • Le guide CLIP, produit par CN-REDD en 2014… Malheureusement, les résultats de ces travaux n’ont à ce jour pas été testés sur le terrain… P. 41.
 
Il est important de mentionner que la RDC n’a adhéré au processus REDD+ qu’en 2009, la prise en compte du CLIP au début dudit processus était difficile voire impossible car c’est grâce à la REDD+ que le CLIP a commencé à se matérialiser en RDC.
Plusieurs contributions du WWF ont été apportées sur ce chantier du CLIP, notamment : 
  • Appui au développement du 1er guide CLIP validé par le comité national REDD+ et testé par plusieurs organisations notamment le RRN dans les 11 anciennes provinces de la RDC ;
  • Second Guide développé au niveau international par le hub Forest and Climate Program de WWF international en se basant sur les expériences terrains de trois bassins forestiers à l’occurrence l’Amazonie, le Mékong et le Congo.
  • Expérimentation de l’approche CLIP sur le terrain et développement d’un processus CLIP pratique, opérationnel et proposé dans le cadre du PRE Maï-Ndombe (voir annexe 11) ;
Bien que le guide CLIP doit être finalisé le plus rapidement possible, le WWF-RDC considère que les principaux éléments de mise en œuvre sont pour le moment respectés dans l’approche du PIREDD Plateaux (voir annexe 11). 
 
Le point 3.2 intitulé : Atténuation des conflits : sous-évaluation et menace sur les résultats de la REDD+
Dans ce passage, le RRI souligne que :
  • Les risques de conflits fonciers sont sous-évalués et négligés par les programmes REDD+ : « Ces pressions font notamment des deux PIREDD des projets à haut risque en termes de conflits fonciers et même d’expulsion… »  « PIREDD Plateaux, exécuté par WWF, comporte également des activités d’agroforesterie communautaire et des activités vivrières « intégrées » (mêlant élevage et petite agriculture) sans activité de clarification foncière. P. 46 ».
Le PIREDD Plateaux met en œuvre des actions permettant de clarifier les droits fonciers sur les espaces avant d’appuyer des activités de production. Cela est notamment le cas avec les déclarations de vacances de terres liés à tous contrats de paiement pour services environnementaux (PSE) (voir annexes 15 & 16).   
Il est pourtant nécessaire de préciser que le PIREDD ne fait pas d’élevage contrairement à l’affirmation du rapport.
Il est aussi dommage que les travaux de clarification foncière réalisée, notamment par la délimitation des espaces de droits coutumiers et autres ne soient pas reconnus par le RRI. La cartographie des espaces coutumiers est pourtant suffisamment avancée sous le PIREDD Plateaux avec plus de 150 terroirs villageois définis de manière participative. RRI devrait s’enquérir des avancées auprès de la cellule du Programme d’Investissements forestiers PIF et/ou des administrations décentralisées et des communautés officiellement reconnues sur leurs espaces depuis les travaux du PIREDD. 
  • ’histoire des conflits entre concessionnaires et communautés se répète avec les projets REDD+ : les cas de ERA/WWC et de WWF. « Le système de paiement pour services environnementaux mis en place dans le cadre du projet Carbon Map and Models ( Cartographie et Modélisation du Carbone) du WWF souffre également de conflits avec les communautés…P. 47 »
 
De manière générale, le CM&M (Carbon Map & Models), projet d’envergure nationale, a permis de développer une carte nationale de la biomasse à l'aide de la technologie novatrice LiDAR (Light Detection And Ranging) aéroporté qui fournit des données indispensables sur la teneur précise en carbone stocké dans les forêts de la RDC et la mise en œuvre concrète des concepts REDD+, en collaboration avec 3 différents acteurs intervenant dans la Province du Maï-Ndombe comme zone d’intérêt.
 
Plus spécifiquement, le projet CM&M a :
 
  1. aidé la RDC à identifier les zones les plus efficaces pour mettre en œuvre des activités favorisant la réduction de ces émissions afin d'atteindre ses objectifs climatiques;
  2. mis en place des projets pilotes de terrain avec des communautés locales, collaboré avec une entreprise d’élevages de bovins et un concessionnaire forestier pour développer et établir des stratégies de gestion qui sont en même temps viable économiquement, mais aussi réduisent les émissions ;
  3. fourni à la RDC des concepts pour opérationnaliser et traduire son intention de réduire les émissions par des activités concrètes;
  4.  joué un rôle déterminant dans la préparation d'un Programme de Réduction des Emissions (ERP) au Fonds carbone du Fonds de partenariat pour le carbone forestier (FCPF);
  5. soutenu les institutions concernées en RDC à préparer l’ERP (  dans la province de Maï-Ndombe et à recevoir des paiements REDD+;
  6. encouragé le transfert de technologie et de connaissances en ce qui concerne l'estimation de la biomasse et la mise en œuvre de la REDD+ au sein des institutions nationales et des structures gouvernementales pertinentes.
S’agissant de la question relevée sur les conflits, il n’y a à notre connaissance aucun conflit à ce jour qui aurait affecté les PSE (Paiement pour Services Environnementaux) mis en place par le projet CM&M. Le seul conflit qui avait opposé les terroirs de Nkala et Mpelu en 2014 après la mise en place du reboisement par le consultant de Tombokolo, a été résolu. Les deux communautés avaient été réunies et un consensus avait été trouvé entre les deux dans le sens où le conflit de limite devrait être arbitré par le tribunal coutumier de Mbee reconnu mutuellement par les deux terroirs. Le PV de résolution de ce conflit est disponible. Cela est un exemple supplémentaire de gestion positive de conflits instauré par les structures appuyées dans le cadre des projets relatifs.
 
Par rapport aux termes de payement dont fait allusion le rapport, les contrats élaborés à cet effet sont clairs et les modalités de payement ainsi que le suivi et vérification y sont suffisamment détaillés (voir annexes 12, 13 & 14). Les contrats sous le projet CM&M pour leur entrée en vigueur sont toujours signés entre la Direction de WWF et la Communauté locale concernée en plus de l’administrateur du territoire et font l’objet d’une autorisation foncière coutumière. Cependant, comme tous contrats, les difficultés de compréhension et d’interprétation sont toujours possibles. C’est la raison pour laquelle le WWF-RDC fait la promotion de contrats détaillés, signés pour la mise en œuvre des activités avec les peuples autochtones et les communautés locales. 
 
Le point 3.3 intitulé : Structure des activités REDD+ : manque d’ancrage environnemental et communautaire
 
  • « Cet ensemble laisse entrevoir une initiative en patchwork, faite de multiples initiatives… » P. 48
 
Se référant à la multiplicité des projets et initiatives REDD+ dans la province du Maï-Ndombe, le WWF-RDC et les ONG partenaires sont aussi d’avis que le PRE (Programme de Réduction des Emissions) devrait faire office de programme commun, juridictionnel, se rapportant à un même niveau de référence lié à une méthodologie unique et permettant de réduire les coûts de transaction de l’ensemble des acteurs afin de favoriser la durabilité du programme.  
 
Le RRI affirme aussi que :
  • « Les comités locaux de développement, structures communautaires centrales dans la majorité des projets, ne sont pas représentatifs, et leur fonctionnement est opaque » P. 49:
  • « Malgré leur importance, peu d’informations sont disponibles sur leur constitution, leur mode de fonctionnement et donc leur légitimité. » P. 49 ;
  • « Malgré les demandes, aucun compte rendu de réunions des CLD n’a été partagé par l’ALE du PIREDD Plateau, le WWF. » P . 49 ;  
 
Les CLD (Comités Locaux de Développement) ne sont pas créés par le PIREDD mais ce dernier facilite leur installation. Ils sont créés par la loi congolaise et se réfèrent aux textes d’application relatifs à l’Agriculture, aux Forêts et au Développement Rural. Les membres sont élus démocratiquement par leurs pairs, suite à l’assemblée générale de la communauté, après une information complète sur ce qu’est le CLD. Les communautés sont libres de s’organiser en CLD ou d’avoir une autre structure représentative, transparente, légitime et responsable suivant des principes démocratiques. La participation des communautés locales et peuples autochtones (CLPA) aux travaux du WWF-RDC est volontaire. Il est fortement recommandé qu’au moins 30% des membres de l’organe de direction soient des femmes. Ils sont accompagnés jusqu’à la légalisation de leur statuts et adoption de leur règlement d’ordre intérieur ainsi que par la suite, selon les capacités du WWF-RDC disponibles et des besoins des CLPA. Leurs capacités sont régulièrement renforcées. Les informations sur leur fonctionnement existent belle et bien (voir annexes 8 & 9). Cette affirmation de RRI est donc objectivement fausse. Aussi, la demande mentionnée dans le rapport concernant des comptes rendu de réunion de CLD n’est pas connu du WWF-RDC et de son responsable au projet PIREDD Plateaux. Peu importe, les comptes rendus sont bien disponibles puisque nécessaires à l’officialisation des CLD déjà formés (Rapport d’appui à la mise en place des CLD disponible) (voir annexe10). Nous  recommandons fortement à RRI d’entrer en contact avec les vraies communautés bénéficiaires car, pour chaque CLD, un PV est signé et distribué aux parties prenantes. Il en est de même pour l’accord de collaboration avec le WWF.
 
  • « seuls 10% des représentants étant autochtones et ne bénéficiant que d’un droit de parole effectif restreint »
Les PA ne se retrouvent pas dans l’ancien district des Plateaux mais par contre à Kiri, Inongo et Oshwe qui sont dans l’ancien district de Maï-Ndombe. Les CLD d’Inongo et de Kiri ont des PA au sein du comité. Dans d’autres terroirs sans peuple bantous, les PA ont leurs propres CLDs. Toutefois dans la pratique, cette démarche requiert du temps. C’est un processus qui ne peut être jugé aujourd’hui. Et toutes les différentes organisations impliquées militent pour que la voix des peuples autochtones soit entendue. De ce fait, il faut plus de temps d’accompagnement avec des actions de structuration et de responsabilisation bien ciblées afin que ces derniers arrivent au bout d’au moins 5 ans à une véritable autonomisation. Par cela, le REPALEF bénéficie actuellement d’un projet d’appui à l’émancipation des peuples autochtones et ont tous les outils pour remédier à la situation décrite dans le rapport. Il est aussi nécessaire de mentionner que les PA appuyés par le WWF-RDC et le REPALEF dans le reste de la province ont eu le choix de s’organiser de façon indépendante ou de s’intégrer dans le CLD de la communauté où ils vivent. Les PA demeurent libres de poursuivre dans cette structure ou de former un CLD ou autre structure de gestion et de représentation selon leur contexte local, leurs besoins et aspirations.
 
  • crées dans le Mai Ndombe  par le WWF pour négocier les cahiers des charges avec la SODEFOR, ils avaient été la source de nombreux conflits… » P. 49
 
Pour ce qui est des clauses sociales des cahiers de charge de 1ère génération, nous conseillons à RRI  de consulter le rapport produit par CIFOR et WWF sur la question (voir annexe 22). Bien que les conflits ne manquent pas dans les communautés, même sans CLD, cette structure de gestion a permis de résoudre plusieurs conflits et de faciliter une communication plus claire et transparente entre acteurs (rapport sur la gestion de conflits et leur réduction disponible). La prise de position de RRI contre ce mécanisme innovant, plaçant les CLPA directement au centre de la négociation pour leur intérêt propre, est surprenante.  
Aussi, Il ressort clairement, eu égard à la manière de présenter cet aspect de choses dans ce rapport, que RRI et les organisations consultées semblent ne pas maitriser le processus pour comprendre le bien-fondé du rôle des ONG de la société civile dans ce processus depuis l’élaboration de l’Arrêté 023 qui en fixe le modèle d’accord, aujourd’hui en pleine révision. Il eut fallu pour RRI de descendre sur terrain pour comprendre comment s’opère le choix des représentants des communautés aux différents comités avec à la base des PV signés.
 
  • « Les moteurs de la déforestation sont méconnus à l’échelle locale… » P. 50
L’analyse qualitative et quantitative des moteurs de déforestation en RDC a été conduite par la société civile suite aux descentes dans les différentes provinces. De plus, une étude a été réalisée au niveau local dans le cadre du projet RPAN sur les moteurs de déforestation dans le territoire de Bolobo en utilisant la méthode de Geist & Lambin (voir annexe 6). Aussi une étude sur le MRV a été réalisée dans la zone de Malebo (voir annexe 7).
Les travaux mis en œuvre avec les communautés sous les PGRN permettent d’adresser les causes de la déforestation directement au niveau des terroirs villageois avec la structure de gestion communautaire mise en place de façon CLIP.
 
  • « Le soutien sur fonds REDD+ à l’exploitation forestière industrielle n’est en accord ni avec les moteurs de la déforestation tels que ciblés par les projets actuels, ni avec la réalité destructrices de cette industrie sur le terrain» P. 55
 
Le WWF-RDC et les ONG partenaires espèrent qu'il sera bientôt possible de reprendre le processus de certification qui évoluait très bien il y a quelques années et qui s'est malheureusement enrayé en RDC et en Afrique Centrale en général, réduisant ainsi d'autant les bénéfices environnementaux, sociaux et économiques liés à l'exploitation forestière de la sous-région.
La mise en place de programme juridictionnel REDD+ arrive à un moment intéressant de l'histoire de la gestion responsable des forêts de l'Afrique Centrale, où la majorité des acteurs reconnaissent un recul majeur de l'aménagement forestier au profit de l'exploitation informelle ainsi que la croissance concomitante des marchés moins exigeants en termes de respect de la durabilité. Le WWF-RDC continuera ses efforts à l’intégration du secteur privé dans la dynamique sociale, économique et environnementale locale en espérant le meilleur pour l'avenir des forêts de l'Afrique Centrale et des peuples qui l'habitent. Nous prenons donc cette occasion pour partager une fois encore la proposition transmise pour l’intégration du secteur forestier dans le REDD+ (voir annexe 17).
 
Le point 3.4 intitulé : Droit à la terre : isolement de la problématique et non prise en compte des dynamiques foncières
 
  • « La foresterie communautaire, une approche sous utilisée de la REDD+… » P. 57
 
Le WWF-RDC est très actif dans l’appui des CLPA  (Communautés Locales & Peuples Autochtones) à bénéficier de leurs droits (voir annexe 20) et prérogatives concernant l’obtention de concessions forestières de communauté locale (voir annexe 21). Tout comme RRI, le WWF-RDC et ONG partenaires croient que l’appui aux concessions forestières des communautés locales (CFCL) doit s’accompagner d’un soutien accru aux CLD ou autre structure de gestion communautaire. Une emphase beaucoup plus prononcée de la REDD+ sur cet outil de sécurisation foncière et de réduction de la déforestation devrait être apportée sans tarder. De plus, les ONG nationales et internationales devraient s’activer davantage à appuyer les peuples autochtones et communautés locales à élaborer leur demande auprès des autorités compétentes. Le WWF-RDC demeure disponible pour partager son expérience en la matière (voir annexe 3).  
 
Le point 3.6 intitulé : Genre : les femmes encore à la marge des projets REDD+
 
  • « Un accompagnement de la participation des femmes aux CLD nécessaire et à encourager » P. 59
 
Le WWF-RDC met en œuvre une stratégie nationale genre principalement axée sur la participation des femmes (ainsi que les femmes autochtones) dans les instances de décisions locales et ses fixés comme objectifs d’atteindre, par la promotion du genre (voir le lien ci-après: https://www.youtube.com/watch?v=WMwRSPtVYyo) , une participation féminine d’au moins 30% au sein des CLD officiellement constitué et d’encourager des activités bénéficiant particulièrement aux femmes et à leur émancipation. Bien que la réalité de la femme dans le pays soit préoccupante, les efforts engagés pour l’accompagnement des femmes se poursuivent. Le WWF-RDC recommande aux ONG nationales et internationales ainsi que les autres acteurs d’appuyer cette démarche de façon plus énergique et harmonisée.
Les anciennes structures locales étaient peu organisées, et la femme n’y était presque pas impliquée étant donné que les exigences de la coutume constituaient pour elle une pesanteur ne lui permettant pas à faire entendre sa voix. En réalité, il manquait au niveau communautaire, une structure représentative à travers laquelle, les actions de développement devraient être canalisées et pilotées. Les CLDs (ou équivalent) sont donc les seules structures à ce jour qui adresse cette problématique de manière effective. Curieusement dans le rapport de RRI, aucune des structures consultées par RRI n’a jamais eu à mettre en place un seul CLD pour comprendre les contours liés à l’installation, au fonctionnement jusqu’à l’autonomisation.
Il serait donc utile de mieux comprendre le contexte organisationnel des communautés, les conditions de vie, l’importance de la dynamique mise en place et son impact progressif à l’amélioration de la gouvernance locale inclusive.
 
Le point 3.7 intitulé : Partage des bénéfices REDD+ : un risque de compromission des objectifs REDD+
 
  • « Le plan de partage de bénéfices ne permet pas de s’assurer que la REDD+ bénéficie aux communautés … » P. 60
 
Le WWF-RDC a une position conjointe avec la société civile et autres parties prenantes sur la question du plan de partage de bénéfices (voir annexe 1). Le WWF-RDC recommande aux parties prenantes de reprendre les consultations et négociations là où elles ont été laissées suite à la communication des commentaires présentés en annexe. 
 
Le point 3.8 intitulé : Amélioration des conditions de vie : des bénéficiaires mal ciblés et des impacts peu maîtrisés
 
  • « Aucun projet ne peut à ce jour prouver son impact positif sur les conditions de vie des communautés locales» P. 62
 
Il est vrai que les impacts sur les conditions de vie des communautés locales sont difficiles à prouver dans l’espace de temps disponible au projet. C’est pour cette raison que le WWF-RDC, avec l’appui d’autres organisations sont en train de développer une méthodologie de suivi participatif des objectifs de développement durable (ODD) des communautés locales et peuples autochtones. Il est espéré par cette mesure conjointe et permanente au sein des communautés volontaires, de suivre efficacement les améliorations des conditions de vie par rapport au ODD. Cette méthodologie déjà en cours d’expérimentation sur le terrain sera bientôt présentée publiquement pour avis et observations avant sa validation par les autorités compétentes. Il sera donc bientôt possible de suivre l’évolution des CLPA par rapport aux ODD et d’orienter les projets de façon plus précise selon les diagnostics locaux périodiquement mis à jour par les CLPA.
 
Le point 3.9 intitulé : Participation et responsabilité des parties prenantes : une faible appropriation communautaire
 
  • « la méthodologie proposée par Rainforest Foundation UK et le Réseau Ressources Naturelles met l’accent sur une durée d’au moins vingt jours par mois dans les villages et sur la participation de l’ensemble de la communauté…  » P. 64
Le WWF-RDC met en œuvre une approche axé sur les résultats. L’ensemble du processus de la cartographie participative fait partie d’un tout (voir annexe : principales étapes du CLIP). Aussi, le processus permet d’arriver à des résultats concrets, tels que le plan de gestion des ressources naturelles (PGRN), la carte d’affectation des terres, tout cela reconnus officiellement par les entités décentralisées, sous un processus participatif, légitime et inclusif (voir annexe 5). 
 
La cartographie participative doit être un outil d’appui au micro-zonage visant à mettre en lumière l’association entre la terre et les populations locales en utilisant le langage connu et reconnu de la cartographie. Cette méthodologie avait d’ailleurs été clarifiée lors de l’élaboration participative des guides de macro et micro zonage de la RDC. C’est donc un processus qui vise à aider les communautés à formuler et transmettre leur savoir spatial aux organisations extérieures ; Permettre aux communautés de conserver et d’archiver le savoir local ; Aider les communautés à planifier l’utilisation des terres et la gestion des ressources, Permettre aux populations de plaider pour le changement ; Améliorer les capacités au sein des communautés ; Traiter les conflits liés aux ressources, etc. (Guide opérationnel de micro-zonage forestier (2014).
 
  • La méthodologie même des paiements basés sur les résultats… n’encourage pas l’appropriation communautaire…  » P. 65
L’appui du PIREDD Plateaux passe au contraire par une dynamique communautaire, commençant par la sensibilisation et la participation volontaire de cette communauté qui a l’opportunité de se définir elle-même ainsi qu’être reconnue officiellement sur son territoire. L'ensemble des actions passent par cette structure légitime et responsable au nom de toute la communauté afin justement d’assurer l’appropriation lors de la mise en œuvre. Cette approche permet notamment de rémunérer les CLPA selon leur implication et la mise en œuvre d’activités produisant des résultats vérifiables. L’expérience actuelle du WWF-RDC dans la mise en œuvre de cette approche a été notamment vérifiée à la réserve de biosphère de Luki et dans une certaine mesure dans le programme Ecomakala au Nord Kivu ou des systèmes semblables de paiement pour résultats ont été appliqués de façon satisfaisante et à grande échelle. 
 
 
Conclusion
 
Le WWF-RDC et les ONG partenaires sont conscients que plusieurs aspects de la REDD+ en RDC nécessitent d’être améliorés. De même, il est utile de recevoir les recommandations des différentes parties prenantes et autres observateurs externes au processus. Cependant, il y a lieu de s’interroger sur les fondements et la légitimité de certaines recommandations dès lors qu’elles n’ont pas fait l’objet de consultations larges et que les principaux bénéficiaires des actions en cours n’ont pas eu l’occasion de se prononcer sur les positions / recommandations prises. 
 
Le WWF-RDC et les ONG partenaires recommandent donc que le RRI puisse s’enquérir des opinions des bénéficiaires sur les aspects de risque soulevés et que ces bénéficiaires soient consultés selon les principes du CLIP afin que les impacts éventuels des positions / recommandations adoptées soient bien compris par les bénéficiaires qui risqueraient d’être amputés de leur droits à recevoir des appuis REDD+, malgré leur consentement à participer de façon volontaire aux projets actuels.
 
Le WWF-RDC et ONG partenaires croient que les risques encourus de conflits fonciers et d’expulsions ou même de déplacement des populations ne font que s’accroitre jour en jour en RDC dans le scénario sans interventions (Business As Usual) et qu’il est urgent de poursuivre les travaux de reconnaissance des communautés locales et des peuples autochtones sur leurs espaces (terroirs villageois) afin de permettre la prise en compte de leurs droits et la mise en place du processus d’aménagement du territoire de façon participative sous l’autorités des entités décentralisées, tel que mis en œuvre par le PIREDD Plateaux.
 
Aussi, il serait utile d’évaluer le risque de ne pas poursuivre les travaux en cours, notamment de ne pas faciliter la clarification foncière de la province du Mai Ndombe ainsi que de ne pas appuyer la mise en place des structures de gouvernance locale tel que déjà engagé sous les travaux du PIREDD Plateaux.
 
Finalement, le WWF-RDC et les ONG partenaires recommandent aux acteurs intéressés par les travaux en cours de participer activement aux consultations publiques offertes afin de mieux comprendre le processus en cours et de contribuer positivement au développement de la RDC.     
 
 
Liste des annexes
 
  1. La note conjointe d'analyse de la société civile, WWF et autres acteurs sur le plan de partage des bénéfices du PRE Mai Ndombe. Ces commentaires étant considérés par le WWF comme la dernière concertation effective sur les documents soumis; 
  2. Le compte rendu de la réunion avec la CN REDD et les parties prenantes concernant la carte de risque et plan de partage de bénéfices du PRE Mai Ndombe; 
  3. La présentation d'une proposition pour informer le plan de partage de bénéfices; 
  4. La note conceptuelle de  proposition d'un mécanisme d'évaluation de la performance locale ; 
  5. Les étapes du processus d’élaboration participative des plans de gestion des ressources naturelles ;
  6. Etude  sur les moteurs de déforestations dans la zone de Malebo ;
  7. Etude MRV dans la région de Malebo ;
  8. Exemple de statuts d’un CLD ;
  9. Exemple d’un document d’ordre intérieur d’un CLD ;
  10. Exemple d’un compte rendu d’une Assemblée Générale du CLD ;
  11. Poster sur le processus CLIP
  12. Poster sur le reboisement
  13. Poster sur la mise en défense
  14. Poster sur l’appui à la protection des forêts communautaires ;
  15. Exemple de contrat Agroforesterie,
  16. Exemple de contrat de mise en défens de savanes anthropiques ;
  17. Proposition pour une exploitation à impact réduite
  18. Principales avancées du PIREDD Plateaux
  19. Méthodologie d’appui avec les PSE
  20. Les Peuples Autochtones et la Conservation: Déclaration de Principes du WWF
  21. Cadre fonctionnel de la stratégie du WWF sur les PA Pygmées en RDC
  22. Rapport CIFOR et WWF de suivi des cahiers des charges sociales)
 
 
N.B. : Cette mise au point du WWF ayant trait au rapport de RRI a été élaboré avec le concours et la contribution des ONG partenaires ci-après: CVDP, AMAR, CENADEP, AVOCATS VERTS, OCEAN, REPALEF, UDME, CDE, CEDEN, CWS, GAPE, CFLEDD, NTOMBOKOLO, ILDI, IGED, CNCEIB, CODHOD, PABO, RAIFORCO, CIAPAFED, GTF, CEFDHAC.
 
 
- Les avis exprimés dans ce document sont ceux de WWF et des ONG partenaires, et ne reflètent pas nécessairement les points de vue des partenaires financiers de WWF en RDC.
 
Les  principaux partenaires financiers  de WWF en RDC sont:
USAID
Union Européenne
NORAD
Ministère allemand de la Conservation de la nature et de la Sécurité nucléaire
KfW
Banque mondiale
Sida
BAD
PNUD
CTB